Carl Weathersby
L'émission "blues" de radio RDL Colmar animée par Jean-Luc et David BAERST


 
Pour débuter cet entretien, Carl, peux-tu te présenter en quelques mots ?
Je me nomme Carl Weathersby et je viens d’East Chicago dans l’Indiana.

Peux-tu revenir sur ton enfance, dans le Mississippi, puisque tu es né à Jackson ?
Oui, j’ai grandi à Meadville (Mississippi) dans une famille constituée de quelques musiciens. Certains d’entre eux jouaient ou de la batterie ou de la guitare. J’avais aussi l’occasion de voir un bon nombre de personnes, issues de cette famille, chanter. A côté de cela, ils travaillaient tous très dur…

A titre personnel, quand t’es-tu mis à pratiquer la musique et pourquoi as-tu décidé de t’orienter vers la guitare ?
J’ai toujours baigné dans une ambiance musicale et je me souviens avoir, très tôt, appris les rudiments de la batterie, de la trompette et de la guitare. Ce devait être en 1964 (Carl est né en 1953, Nda).

Je me suis lancé, plus précisément, dans une carrière de musicien à l’époque où Ronald Reagan était le Président des Etats-Unis. Avant cela j’ai exercé plusieurs professions, j’ai travaillé dans une aciérie, été gardien de prison et j’ai même intégré la Police.

Parallèlement je continuais à jouer de la musique, pour mon propre plaisir. C’est, réellement, au début des années 1980 que j’ai décidé d’en vivre. Cela fait donc une trentaine d’années.

Quelles étaient tes influences ?
J’avais beaucoup d’influences…
Les principales étaient Albert King, BB King, Little Milton, Tyrone Davis, Isaac Hayes, Johnnie Taylor et beaucoup d’autres artistes que je pouvais entendre…

Je m’imprégnais de tout ce que j’écoutais et m’amusais à extraire ce que je préférais chez chacun d’entre eux, afin de m’en servir dans mon propre jeu.

Comment as-tu rencontré Albert King ?
Albert King était un ami de mon père et de mon oncle. Pour moi, avant d’être un nom sur une pochette de disque, c’était avant tout un ami de la famille.
Ils avaient les mêmes connaissances et je l’ai connu dès le début de ma vie.

Peux-tu revenir, plus précisément, sur tes débuts professionnels ?
C’est en 1979 que j’ai commencé à toucher mes premiers cachets mais c’est en 1981 que ma carrière a vraiment débuté.

Je crois que c’est durant ces premières années (entre 1979 et 1981) que tu as intégré le groupe d’Albert King. Peux-tu revenir sur cette période ?

Ce qui m’a le plus marqué est le fait de ne plus avoir à travailler en faisant de la musique. De plus j’ai commencé à voyager un peu partout, bien que je n’aie jamais accompagné Albert King en dehors des Etats-Unis. Par contre j’ai découvert des endroits tels que la Californie, New-York, la Floride…

A ses côtés, je me délectais de le voir jouer. De plus, cela m’a permis de rencontrer et de voir ses produire de grands artistes comme BB King et tous ces gens qui ont, eux-mêmes, inspiré Albert King.
Il faut savoir qu’il passe aujourd’hui pour une «grande figure» du Blues mais, qu’à cette époque, il était très peu reconnu.

A quand remonte ton premier voyage en Europe, puisque tu n’as jamais eu l’occasion d’y accompagner Albert King ?
Mon premier voyage de ce côté-ci de l’Atlantique a eu lieu alors que j’accompagnais Buster Benton et Billy Branch. Ce devait être en 1983 ou quelque chose comme ça…

Je n’étais, non plus, jamais venu en Europe alors que j’étais à l’armée puisque j’étais basé dans le Pacifique (Carl est un vétéran de la guerre du Vietnam, une triste expérience qui l‘a profondément marqué et à laquelle il a participé entre 1971 et 1977).
Le fait de me produire ici pour la première fois a été une chose très excitante et «fun» !
J’y suis souvent revenu et cela a toujours été synonyme de très bons moments !

Puis-je en profiter pour te demander d’évoquer ta collaboration avec Billy Branch (au sein du groupe de ce dernier, The Sons Of Blues) ?
J’ai joué avec Billy Branch sur une période de 16 ans. Quand j’ai rejoins son groupe, j’ai eu l’impression de me retrouver à côté de quelqu’un comme Little Walter tant ses talents d’harmoniciste sont développés. Mon grand-père et certains de mes oncles jouaient aussi de cet instrument, je savais donc ce qu’était un bon harmoniciste !

Beaucoup de gens pensent savoir maîtriser cet instrument à la perfection. Cependant ils sont souvent limités à l’interprétation d’un seul registre alors que Billy sait tout faire !
En plus de son talent de musicien, il est un parfait showman qui sait bouger sur scène. Il écrit aussi des chansons, j’ai beaucoup appris de lui…

Pourquoi, après toutes ces collaborations prestigieuses, as-tu décidé de monter un groupe et de te produire sous ton propre nom ?
Cela remonte à 1996...
Je n’étais pas vraiment décidé à le faire mais c’est un producteur qui m’a proposé un « deal » afin que j’enregistre un disque. Il aimait ce que je faisais et trois semaines après m’avoir dit cela il est revenu me voir avec un contrat d’enregistrement.

Vers la fin de l’année, il m’a proposé de faire de nombreux concerts alors que je travaillais encore avec Billy. J’avais une longue liste d’engagements à venir et j’ai été obligé de faire un choix, j’ai donc décidé de poursuivre ma carrière sous mon propre nom (d‘autant plus que sa popularité allait en grandissant et qu‘il devait lui être de plus en plus difficile pour lui de jouer les « seconds couteaux), Nda).
Je l’ai fait et cela a été un grand moment dans ma vie, David (rires) !

Comment qualifierais-tu ton style ?
Je ne sais pas exactement…
Quand je joue avec mon groupe, j’ai vraiment mon propre son.
Ma musique est très intense…

Parfois le rythme est très entraînant et le tempo est très rapide. Lors de mes shows, j’essaye de faire le tour de tout le spectre musical qui m’a influencé. Ainsi, je peux jouer du Blues traditionnel, du Rock-Blues, du Rythm and Blues…
Bref, je mélange toutes les bases musicales qui ont fait que j’ai eu envie de devenir musicien.

Dans la nouvelle génération de guitaristes. Quels son tes préférés ?
Je ne connais pas beaucoup de nouveaux guitaristes ou chanteurs qui me touchent. Je trouve qu’ils ont du mal à trouver leur propre voie. Par exemple, quand tu écoutes les premières mesures d’une chanson de Freddie King ou BB King, tu arrives immédiatement à en reconnaître l’interprète. C’est pareil avec Albert Collins, tu sais tout de suite que c’est lui.
Je suis plus perplexe quant aux nouveaux venus. Ils ont du talent mais, pas toujours, une vraie personnalité musicale.

Connais-tu le nombre de disques auxquels tu as participé ?
(Hésitation)… Je n’en suis pas sûr…
J’ai collaboré avec beaucoup de gens…

Je pense que cela doit avoisiner les 18 ou 19 albums, peut être plus (A ce jour Carl a sorti 8 albums sous son propre nom et je l‘ai trouvé crédité sur 24 disques d‘artistes tels que : Billy Branch, Buster Benton, Hubert Sumlin, Carey Bell, Rico Mc Farland, Trudy Lynn, Little Milton etc…, Nda).
Je ne le sais pas précisément (rires) !

Tu tournes actuellement avec Mississippi Heat. Que représente ce groupe pour toi ?
Mississippi Heat n’est pas un groupe qui a, tout à fait, le même son que moi. Il se produit dans un registre plus traditionnel et respecte beaucoup les règles de cette musique. C’est vraiment bon et je suis content de pouvoir m’adapter à ce registre !

Pierre Lacocque est un harmoniciste qui sait exploiter différents angles de son instrument. Ce groupe est la représentation de ce qu’est réellement le son du Blues. En même temps il y apporte une vision plus moderne à travers les rythmes et les mélodies. C’est vraiment bon…

Est-ce différent, pour toi, de travailler avec un leader d’origine européenne qu’avec un américain. Sa vision des choses est-elle différente ?
Il n’y a pas tant de différences que ça…
Quand tu travailles avec Pierre, il faut être attentif à ce qu’il dit, il a des idées très précises. C’est assez aisé en fait, c’est vraiment un très bon gars !

Par contre je pense que tu dois trouver, de chaque côté de l’Atlantique, plus de différences entre les publics ?
En ce qui me concerne, je constate que le public européen me connait davantage que beaucoup d’américains. Quand nous jouons aux USA, nous n’avons pas une base de fans aussi solide qu’en Europe. Quand je viens ici, je constate que de nombreuses personnes savent que j’ai joué sur l’album de tel ou tel artiste et que j‘ai collaboré à 5 reprises à des disques de Mississippi Heat…

Au Etats-Unis on me dit « Wouah mec ! Tu sais vraiment jouer de la guitare, tu devrais faire des disques! »…
Le public européen est vraiment constitué d’appréciateurs de cette musique, ils savent qui nous sommes. Ici, nous n’avons qu’à venir et nous installer pour jouer, c’est beaucoup plus facile. C’est aussi une grande différence !

As-tu des projets spécifiques ?
Je ne sais pas encore exactement ce que je vais faire mais j’aimerais enregistrer un nouvel album live. Je le ferai probablement avec un groupe conséquent constitué de 4 cuivres et de choristes. Le plus important est d’avoir un bon son et de belles histoires à raconter…

Aurais-tu une conclusion à ajouter ?
Je voulais te remercier pour l’intérêt que tu me portes et pour cette interview. J’apprécie vraiment, merci David !

Remerciements : Bernard Villeneuve (Willing Prod)

www.carlweathersby.org

 
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Interview réalisée
Chez David» Colmar
le 29 mars 2010

Propos recueillis
par David BAERST


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